Quand on est éducateur et comportementaliste canin, on est (normalement) passionné par l’espèce canine. On aime apprendre, se former, accumuler les connaissances nouvelles sur notre animal de cœur. On finit par en connaître un rayon sur les techniques les plus efficaces pour éduquer Médor, on sait décrypter tous ses faits et gestes, analyser le moindre de ses agissements. On constate que notre technique s’affine, qu’on obtient chaque jour de meilleurs résultats avec les chiens de nos clients. Et pourtant, nous éducateurs, sommes bien loin de n’avoir que des chiens parfaits. Parce que nous recueillons souvent des chiens condamnés à l’abandon ou à l’euthanasie, victimes d’humains dépassés, d’une éducation incohérente qui a fait de gros dégâts (je pense bien sûr à mon Border Collie Indy, qui reste inapprochable par les inconnus après plusieurs années d’éducation coercitive), de la mode, d’une génétique hasardeuse, ou de plusieurs de ces causes à la fois. Mais aussi, parce qu’il arrive qu’un individu semblant défier toutes les lois de l’apprentissage, se place sur notre chemin (Sirius… cela te concerne).
Ces chiens « difficiles », on en croise à chaque coin de rue. Ils nous semblent toujours plus faciles à gérer quand il s’agit de ceux des autres. Quand cela tombe sur nous, on se rend compte à quel point avoir pour compagnon un tel chien est un défi de tous les jours. C’est pourtant avec ce chien-là qu’on apprendra le plus, entre deux crises de larmes. Car petit à petit, on avance, même si c’est lent, très lent. Et l’on apprend à s’attacher à des petits succès, et ce chien qui nous a pourri la vie par moments, on a alors envie de le prendre dans nos bras (s’il le veut bien !) et de lui dire combien on l’aime.
Aucun chien n’est parfait. Aucun humain n’est parfait. Parce que nous sommes vivants, nous avons des émotions, nous traversons des moments difficiles parfois, et ces souffrances font de nous des être un peu cabossés. Votre chien n’est peut-être pas le modèle d’obéissance dont vous rêviez, il ne suscite peut-être pas l’admiration de votre entourage, on vous dit peut-être que ce n’est qu’un chien, que vous devriez lui serrer un peu plus la vis, et j’en passe. Comme Indy, il n’aime peut-être pas les personnes inconnues, les mains qui veulent le toucher. Peut-être qu’il n’aime pas jouer à la balle, ou avec les autres chiens. Eh bien, tant mieux ! Cela signifie qu’il est un individu à part entière, capable de faire des choix, d’avoir des préférences. Et puis, à n’importe quel moment de sa vie, un chien peut changer, si on le lui demande d’une manière qu’il peut comprendre, qu’on sait se remettre en question et qu’on n’en attend pas l’impossible. Car c’est en acceptant les « défauts » de votre compagnon, et les vôtres, que vous pourrez progresser. Chérissez votre chien « difficile », car grâce à lui, vous apprendrez à observer, à analyser, et donc, inévitablement, à vous améliorer.
Elsa Weiss / Cynopolis
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