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Photo du rédacteurCynopolis Elsa Weiss

Une méthode « miracle » d’éducation canine ?

« Vous avez éduqué vos chiens à ne pas aboyer ? On ne les entend jamais. »

Telle est la question que l’un de nos nouveaux voisins nous a récemment posée, quelques mois après notre emménagement dans un grand appartement avec nos trois chiens. Trois chiens… autant vous dire que trouver à nous loger n’a pas été évident. Pourtant, à part quelques poils (bon, ok, beaucoup de poils, l’aspirateur fonctionne deux fois par jour…) dispersés sur le sol, personne ne devinerait que des chiens de taille conséquente vivent chez nous. Éduqués à bien se tenir ? Pas spécialement. Si nos chiens sont calmes à la maison, c’est avant tout parce que leurs besoins sont comblés.


Nos chiens ne sont pas parfaits (surtout ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit !). Mais il est vrai qu’ils sont agréables à vivre au quotidien. Ils ne tirent pas en laisse, sont en liberté dans les lieux tranquilles, reviennent au rappel, sont à peu près sociables avec les autres chiens. Je n’en exige pas davantage d’eux. Je ne suis pas du genre à vouloir le contrôle absolu, « au pied-assis-couché-debout-pas bouger », ils savent faire, mais je ne les embête pas avec ça car je n’en ai quasiment pas l’usage au quotidien. Je leur apprends beaucoup de choses, des « tricks » notamment, mais le but est ici de faire travailler leur petite tête et de partager des moments de complicité. En-dehors de cela, je tiens à les laisser être des chiens, tant qu’ils n’embêtent personne (je les rappelle toujours et les rattache quand je croise du monde).


On peut ne pas s’y connaître beaucoup en éducation, et pourtant avoir un chien agréable à vivre : en lui offrant tout simplement une VRAIE vie de chien ! L’éducation devrait venir ensuite, pour régler les quelques soucis éventuels rencontrés : je parle souvent de l’éducation comme d’une épice qui viendrait agrémenter un plat. Pourtant, la plupart des propriétaires de chiens souhaitent « éduquer » leur chien avant même de combler ses besoins. Certains passent même ces besoins totalement sous silence : ils ne prennent pas la peine de sortir leur compagnon quotidiennement mais veulent lui imposer une marche au pied militaire ; ils ne le lâchent presque jamais mais exigent qu’il reste connecté à eux et revienne au rappel en un claquement de doigts ; ils lui imposent des contacts canins multiples et répétés mais se fâchent s’il exprime son besoin d’être laissé tranquille ; ils lui interdisent d’exprimer son instinct de poursuite mais ne lui proposent aucune alternative pour le combler.


Bien sûr, on ne peut pas laisser son chien faire tout et n’importe quoi. Mais si vous réprimez les comportements naturels de votre animal, ces derniers resurgiront sous une autre forme. C’est inévitable. Votre compagnon pourra devenir réactif, anxieux, aboyeur, destructeur, dépressif. Il pourra s’auto-mutiler (cela commence souvent par un léchage compulsif d’une patte avant, et peut mener à des plaies conséquentes), développer des dermatites, des problèmes gastriques. Choisir de partager sa vie avec un animal aussi hédoniste que le chien pour lui interdire d’exprimer tous les comportements inhérents à son espèce, est un non-sens absolu.


Alors, de quoi un chien a-t-il besoin ? D’activité, tout simplement ! Or, le manque d’activité est la cause numéro 1 des problèmes rencontrés par les propriétaires dans notre société actuelle. Un chien a besoin de bouger : le jardin ne compte absolument pas dans ce cas. Un chien seul dans un jardin ne s’y amuse pas. Médor a besoin de sortir tous les jours, de renifler, d’explorer, de rencontrer des congénères s’il les apprécie (soyez observateur : s’il préfère sa tranquillité, ne le forcez pas !). Les promenades sont bénéfiques si elles se déroulent en liberté (à condition de rappeler votre chien à chaque croisement avec une personne ou un congénère…) ou en longe. Si vous êtes en ville, une laisse de deux mètres est préférable à une laisse courte : un chien marche vite, et le contraindre à marcher au pied en permanence risque de le frustrer et de le faire monter en pression au fil du temps.


Le chien a aussi besoin d’activité mentale et/ou olfactive : apprendre des tours, chercher de la nourriture ou un jouet caché… Les besoins sociaux du chien sont également très importants : il est un animal qui a besoin d’appartenir à un groupe, ou au moins d’avoir un humain de référence suffisamment disponible pour lui. Travailler et devoir s’absenter, c’est normal, mais si vous laissez Toutou seul quinze heures par jour cinq jours sur sept, vous ne pouvez pas lui offrir une vie de qualité. Enfin, bien le nourrir est indispensable : essayez d’alterner croquettes et friandises à mâcher longuement, si vous ne nourrissez pas votre chien au cru (ce qui est bien plus adapté à sa physiologie mais n’est pas possible pour tout le monde).


Ayant des chiens de travail, je ne peux pas conclure cet article sans vous parler du besoin de travail de nombreuses races : actuellement, Border Collies et Malinois sont à la mode, et bien peu se voient offrir une mission. C’est pourtant indispensable à leur bien-être et c’est ce qui les fait vibrer : agility, cavage, mantrailing, mushing, ring, les possibilités sont nombreuses ! Je pratique le troupeau dans le cadre de mon activité professionnelle, mais je n’oriente pas nécessairement les propriétaires de Borders vers cette activité : impliquant d’autres êtres vivants que le chien et son humain, le troupeau ne devrait pas être envisagé comme un « loisir ». Dans tous les cas, si l’on ne peut pas proposer de travail à une race qui a été sélectionnée pour cela, mieux vaut renoncer à elle. Les races de travail (je parle de celles qu’on utilise encore aujourd’hui dans un cadre de travail… car à la base, presque toutes les races de chiens avaient un « métier ») ne peuvent pas se satisfaire d’une « simple » vie de chien de compagnie. Elles peuvent être de formidables compagnons, mais elles ont besoin d’une mission pour être épanouies. Retenez de toute façon, qu’aucune race de chien ne peut s’épanouir sans un minimum d’activité. Même un petit Pékinois ou un gros Mâtin de Naples !


On parle beaucoup de sur-stimulation, mais malheureusement, l’hypo-stimulation est mille fois plus répandue chez nos chiens de compagnie. Nos toutous s’ennuient ! Et c’est souvent pour cela, qu’ils présentent ce qu’on pense être des « problèmes de comportement ». Évidemment, chaque chien a une génétique qui lui est propre, et ce n’est pas parce qu’un chien ne tolère pas ses congénères, ou qu’il ne revient pas rapidement au rappel, que ses besoins ne sont pas comblés. Mais avant d’entreprendre une éducation ou une rééducation, il est important de se demander en premier lieu, si l’on fait tout dans le sens du bien-être de son animal.


Et puis, le plaisir d’avoir un chien ne réside-t-il pas dans les activités multiples que l’on peut partager avec lui ? Faites des choses avec lui, il n’attend que cela… Et, bien vite, vous adopterez la philosophie canine : on n’a qu’une vie, et c’est à fond qu’il faut en profiter !


Elsa Weiss / Cynopolis

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